Près d'un quart des recettes de la voie de transport maritime a fondu au cours de l'année fiscale écoulée, conséquence de la crise sécuritaire en mer Rouge. Un coup dur pour l'Egypte, ces revenus représentant sa troisième principale rente.
Par Justine Babin, Les Echos
C'est une année de vaches maigres pour le canal de Suez. Les revenus tirés des droits de passage par la voie maritime égyptienne ont chuté de 23 % au cours de l'année fiscale 2023-2024, à 7,2 milliards de dollars (6,6 milliards d'euros), conséquence de la perturbation du trafic en mer Rouge occasionnée par les attaques houthistes contre les navires marchands.
Le nombre de bateaux transitant par le canal – 20.148 au cours de l’année fiscale écoulée – a reculé dans des proportions similaires, selon un communiqué de l’Autorité du canal de Suez (SCA), à l’occasion d’une visite dans ses locaux, le 17 juillet, du général Michael Kurilla, à la tête du commandement central (Centcom) de l’armée américaine, chargé des opérations au Moyen-Orient.
Pour l’Egypte, cette crise provoque un manque à gagner considérable, affectant l’une des principales rentes du pays, qui représente environ 2 % du PIB. Ces revenus étaient en hausse depuis six ans, jusqu’à un record de 9,4 milliards de dollars (8,6 milliards d’euros) en 2022-2023. Mais le déficit de la balance des paiements s’est largement creusé au cours des neuf premiers mois de l’année fiscale écoulée, à 17 milliards de dollars (15,6 milliards d’euros), contre 5 milliards (4,6 milliards d’euros) l’année passée, selon la Banque centrale égyptienne.
Une baisse de 17 % des envois de fonds de la diaspora, première rente du pays, en raison d’incertitudes sur le taux de change de la livre égyptienne, a également contribué à aggraver ce déficit ; elle est légèrement compensée par une hausse de 5 % des recettes touristiques, deuxième source de devises.
Détour par le cap de Bonne-Espérance
Depuis le début des attaques en novembre, beaucoup de transporteurs évitent cette route empruntée habituellement par environ 12 % du commerce mondial, lui préférant un détour par le cap de Bonne-Espérance, en Afrique du Sud. Le groupe armé yéménite avait initialement déclaré son intention de ne cibler que les navires en relation avec Israël, pour contester la brutale opération militaire à Gaza en représailles aux attaques du Hamas palestinien, mais des bateaux sans lien avec l’Etat hébreu ont également été visés.
Les opérations militaires multinationales « Gardien de la prospérité », lancée en décembre par les Etats-Unis, et « Aspides », portée par l’Union européenne depuis février, afin de protéger les navires en mer Rouge, ne suffisent pour l’instant pas à mettre un terme à cette crise qui se prolonge depuis neuf mois. Deux assauts conduits à l’aide d’embarcations en mer, de drones et de missiles antibalistiques ont par exemple encore été revendiqués le 15 juillet par les houthis contre deux pétroliers.
Ces attaques se sont par ailleurs étendues géographiquement. Les opérations commerciales maritimes du Royaume-Uni (UKMTO) ont ainsi déclaré vendredi matin avoir reçu un rapport d’incident au sud-est d’Aden. D’autres attaques ont précédemment été revendiquées dans l’océan Indien.
Les houthis affirment enfin se trouver derrière une attaque de drone qui a eu lieu tôt dans la nuit de vendredi à Tel Aviv, ayant fait un mort et plusieurs blessés.