Israël-Hamas, une trêve pour rien ?

Israël-Hamas, une trêve pour rien ?
الخميس 23 يناير, 2025

ÉDITO. Aucun chemin vers la paix ne peut être crédible tant que le mouvement islamiste palestinien reste au pouvoir dans la bande de Gaza.

Par Luc de Barochez. LE POINT.

La sinistre réapparition de combattants du Hamas armés et masqués, paradant en treillis dans la bande de Gaza dès les premières heures du cessez-le-feu dimanche 19 janvier, témoigne de la volonté du mouvement islamiste de se réinstaller au pouvoir comme si de rien n’était. L’armée israélienne se prépare à évacuer une grande partie du territoire, mais les terroristes, eux, restent. Le Hamas entend tirer profit de la trêve qu’il a conclue avec Israël et dont la première phase, d’une durée de six semaines, prévoit la libération d’encore 30 otages – après les trois femmes relâchées le 19 janvier – sur les 95, vivants ou morts, toujours détenus. À l’évidence, le mouvement islamiste veut utiliser ce laps de temps pour affermir son contrôle sur les 2,5 millions de Palestiniens de la bande de Gaza et reconstituer ses forces. Il va exploiter le plus longtemps possible l’arme des otages, en ne les libérant qu’au compte-gouttes, pour garder un moyen de pression efficace sur Israël.

La paix entre Israéliens et Palestiniens n’est pas imaginable tant que des groupes politico-militaires qui veulent effacer l’État juif de la carte du monde restent aux commandes côté palestinien. C’est encore plus vrai depuis le 7 octobre 2023, lorsque des milliers de combattants assoiffés de sang ont surgi dans les kibboutz du sud d’Israël pour tuer, torturer et violer des civils israéliens désarmés. Le bilan des quinze mois de guerre qui ont suivi ce massacre est dramatique. Une grande partie des otages ont perdu la vie. Côté palestinien, les hostilités ont fait plusieurs dizaines de milliers de morts, parmi lesquels, selon les estimations israéliennes, environ 17 000 combattants du Hamas. Des milliers d’immeubles d’habitation ont été détruits, ainsi que beaucoup d’infrastructures civiles – hôpitaux, écoles, routes…

Pour empêcher la reprise des combats, pour permettre de commencer la reconstruction tant attendue, il est impératif que les Palestiniens se dotent d’une direction crédible. Tous les citoyens de bonne volonté qui pressentent que la création d’un État palestinien pacifique à côté d’Israël est la seule solution viable pour régler le conflit ne peuvent pas accepter le maintien, sous une forme ou sous une autre, du Hamas au pouvoir. Il faut espérer que les responsables politiques en soient conscients, y compris l’ONU, dont l’agence chargée des réfugiés palestiniens a toléré de coupables compromissions de certains de ses employés avec les djihadistes ces dernières années.

Israël a affermi sa position stratégique dans la région depuis le 7 Octobre, en affaiblissant l’Iran et son réseau de milices islamistes anti-occidentales et anti-israéliennes. Mais son principal but de guerre, l’éradication du Hamas, ne sera pas atteint tant que celui-ci restera au pouvoir. Par ailleurs, l’image internationale d’Israël a terriblement souffert. L’assimilation de la guerre à Gaza à un « génocide » – même si le conflit trouvait son origine dans un massacre non provoqué –, la présentation de l’État hébreu comme un pays « colonialiste » – comme si le peuple juif n’avait aucun lien historique avec la terre d’Israël ! – sont devenus des lieux communs à travers le monde. L’armée israélienne l’a peut-être emporté militairement, elle n’est pas loin d’avoir perdu politiquement.

La force militaire ne peut pas, à elle seule, vaincre une idéologie radicale. Il manque toujours une alternative politique pacifique qui fasse justice aux deux peuples en conflit pour la même terre. Seul Israël peut offrir cette alternative, mais seuls les Palestiniens peuvent se doter d’une direction crédible qui pourrait permettre aux Israéliens de surmonter le traumatisme du 7 Octobre et de s’engager sur la voie de la paix. Un mince espoir est apparu avec le cessez-le-feu du 19 janvier. Il faut tout faire pour le conforter ; c’est l’intérêt des Palestiniens comme celui des Israéliens. Or le manque de confiance mutuelle est tel qu’un seul faux pas, d’un côté ou de l’autre, peut tout faire déraper.

La France et l’Europe pourraient, une fois n’est pas coutume, jouer un rôle efficace et utile pour faciliter l’émergence d’une nouvelle direction palestinienne qui ne soit pas acquise au terrorisme. L’aide que les Européens apportent depuis des années aux Palestiniens – 120 millions d’euros viennent encore d’être débloqués par la Commission de Bruxelles pour l’aide humanitaire – doit être utilisée pour peser dans ce sens. Faute de quoi la reprise de la guerre sera le scénario le plus probable.